Jamaïque #4, Première semaine à Kingston

Bien, reprenons.

Tu te demandais donc, l’ami, ce que je fabriquais en Jamaïque. Et bien je m’en suis allée faire un stage, figure-toi.
Globalement, c’est très administratif. Du coup par respect pour toi, ô lecteur, je t’épargnerai les détails des tâches qui m’y sont confiées. De toutes façons je suis tenue à la confidentialité, héhé.
En tous cas, il y a du boulot ! Crois-le ou non l’ami, malgré les palmiers je bosse plus ici qu’en Belgique…

dessin palmier

Pour mon premier jour, j’ai rejoint un consultant qui bosse au même endroit à son hôtel non loin de chez moi. James White, c’est comme ça qu’il s’appelle. De là, on a pris un taxi pour aller au boulot. Environ 9 min de trajet d’après Google Maps, plutôt une demi-heure en comptant les embouteillages. C’est comme ça que j’ai pris l’habitude d’aller en taxi au boulot, avec Peter comme chauffeur. Un taxi « de luxe », comme avec Raymond, ou nous sommes les seuls passagers. C’est sûr, ça me reviendrait moins cher de prendre le minibus ou les taxis partagés, mais James est bien sympa avec moi et je n’ai pas le cœur de le laisser tomber pour nos trajets quotidiens. Sans compter qu’à la ville, faut se méfier des pickpockets paraît-il.
James, c’est typiquement un Anglish. J’entends par là un Anglish gentleman, bien sûr. À deux reprises déjà, à la nuit tombée, il m’a raccompagnée jusqu’à ma porte par sécurité…
On ne s’emballe pas les filles, c’est un vieux gentleman. Ça pourrait être mon père.

Au bureau, j’ai fait la connaissance de la personne la plus importante: Mrs Q, la kitchen lady.
Mrs Q prépare le café le matin en chantant, c’est rafraichissant. Elle est mimi et son café déchire. Bien noir, comme on aime chez nous en France. Je dis chez nous, parce que j’ai remarqué que je suis la seule à le boire noir, parfois avec un peu de sucre. Les autres, toutes nationalités confondues (oui parce qu’il y a une mixité géographique importante là où je fais mon stage), boivent le café:

  1. Avec beaucoup de sucre et du lait ;
  2. Avec de la crème déshydratée en poudre ;
  3. Avec du lait concentré sucré ;
  4. ou alors ils ne boivent pas de café du tout.

Ça m’a un peu rappelé la fois au Botswana, où j’étais en très sérieuse carence de caféine. Ça doit être un truc d’ex-colonie britannique ça, ils ne boivent que du thé.

Le premier soir, je me suis retrouvée à boire des coups au bar en compagnie de deux hommes âgés du double de mon âge : James-White-Le-Consultant et Martin-Le-Big-Boss, situé au sommet de la chaine alimentaire. Ce qui est rigolo, c’est que je ne savais pas où on allait avant de me retrouver dans le bar. Dans la voiture, je pensais qu’on me raccompagnait gentiment chez moi voilà tout. Quelle naïveté. Personne n’avait pensé à me prévenir qu’on s’arrêterait d’abord au bistrot, ni à me demander mon avis d’ailleurs. Enfin tu me connais, je n’aurais pas dit non à un p’tit verre de toutes manières. Un p’tit verre, deux p’tits verres, trois p’tits verres… On a fini une bouteille de rouge à trois. Je vous rappelle qu’on était un mardi, et qu’on n’avait pas mangé.
A ce moment là, je me dis « ça y est, on va pouvoir y aller » (je précise que j’avais encore le décalage horaire dans les jambes, j’étais pompette, j’avais faim et envie de me coucher à 9h). Martin-Le-Big-Boss commande une deuxième bouteille et une assiette combo à manger. Ouf. Enfin non, en fait. L’assiette combo était composée de 2 mini brochettes, 3 crevettes et quelques trucs non identifiables d’origine végétale, à se partager…stereotype 2 Soit dit en passant, le tout coûtait bien la peau du cul PLUS les yeux de la tête. L’endroit était clairement un bar pour « expatriés qui ont de la tune ». Et un p’tit verre, deux p’tits verres, trois p’tits verres. Enfin, on rentre. Il était temps, je crois bien que toute éméchée que j’étais, j’ai commencé à parler de Marie Jeanne…
Le lendemain, James-White-Le-Consultant me dit que je suis une vraie femme et une vraie française, qui fume et qui boit du vin. À ses yeux, c’est un compliment. Je ne sais pas.

Après une semaine éreintante, taxi-boulot-dodo (ben ouai quoi, y a pas le métro ici), j’ai passé mon premier weekend à bosser. J’avais des devoirs à faire pour l’école. Pardon, l’univ’. Heureusement, Elizabeth a sauvé mon samedi soir.

Elizabeth est une jamaïcaine de 50 ans de Kingston, une pure souche. Elle m’a envoyé des emails sur CS (Couch Surfing, je précise pour les amateurs) au moment où je demandais des infos en préparant mon voyage, et nous sommes restées en contact.

Donc, samedi, Elizabeth m’a emmenée chez Jojo.

– C’est un bar-resto où ils jouent de la musique live, qu’elle me dit.
– Parfait, je me dis.

chez jojo, Kingston

Elle vient me chercher, m’offre un petit sac de « bienvenue en Jamaïque », dans lequel il y avait divers machins. Des kokonutz, petits bonbons à sucer à base de noix de coco, gingembre et sucre, un peu doux-amers mais pas mal du tout. Des tamarind balls, genre de petites prunes enrobées de sucres, style pâte de fruit un peu acide et pas terrible. Des cacahuètes caramélisées en forme de barres de céréales, miam. Un porte clé Bob Marley. Et un guide du créole jamaïcain. Il y a de sacrées perles là-dedans, je t’en enverrai quelques unes quand je serai de retour à Kingston pour le feuilleter. Oui car aujourd’hui, je t’écris depuis les Îles Caïmans, où j’ai été un peu forcée de m’extrader. Mais ça c’est pour un prochain épisode.

J’en étais où ? Ha oui, nous allons donc chez Jojo. Je découvre que :

  1. Elizabeth ne sais pas conduire : elle s’est garée en épi dans un emplacement en bataille.
  2. Elizabeth ne boit pas. Ne voulant pas risquer un choc culturel, ou peut-être par peur d’être jugée – je ne sais pas trop, je commande timidement un verre de blanc en mettant ça sur le compte d’une habitude culturelle en tant que française. Rétrospectivement, ptet’ bin qu’en faisant ça je contribue aussi au stéréotype français que l’autre Jean-Michel m’a collé l’autre jour. Bref.
  3. Nan, en fait il n’y a pas de n° 3, c’était juste pour rythmer le paragraphe.

danyJe ne sais pas trop pourquoi, je m’attendais à du reggae live, ou au moins un truc qui sonne un peu comme une musique des îles. Penses-tu, of course not, remets tes clichés dans ta poche. À la place on a eu du jazz. Mais pas n’importe quel jazz, attention ! Un espèce de crooner (avec des dreadlocks quand même, ça reste la Jamaïque) chantait des chansons de lover marshmallow, avec conviction quand même, je le lui accorde. Il a chanté pendant 2 ou 3 heures, au cours desquelles il est venu tripoter les épaules de C.H.A.C.U.N.E. des nanas dans la salle (y compris moi, j’te jure), micro à la main et regard langoureux. Si ça avait eu ne serait-ce que le swing de Dany (ndlr : Brillant), j’aurais fondu.

On a mangé notre plat : jerk chicken et festival, assez commun par ici (c’est-à-dire dans les Caraïbes). Le « jerk », c’est la méthode de cuisson : un genre de BBQ au feu de bois. Un poulet rôti, en somme. Avec un bon petit arrière-goût fumé, et parfois (mais pas toujours) des épices. Le festival, par contre, ça n’a aucun intérêt. Je ne sais même pas ce qu’il y a dedans. Ce n’est ni un légume, ni un condiment. On dirait de la mie de pain passée à la friteuse. Ou une pomme dauphine rassie, au choix. C’est folklore, c’est local, c’est sans chichi, servi dans des assiettes en plastique, du papier d’alu, et bon appétit.

Repas Jamaique

 

Et puis à minuit, au lit !

 

 

 

2 Comments

  1. 18 avril 2016

    Je laisse encore un commentaire qui ne sert pas à grand chose mais qui signifie : j’attendais l’article, il est arrivé, je l’ai lu (ou plutôt dévoré) et j’ai adoré, comme d’habitude ! Du coup voilà, tu sais que tu as une fan qui attend la suite de tes aventures impatiemment. C’est un peu comme un recueil de nouvelles en fait : je lirais bien une de tes histoires chaque soir avant d’aller au lit, ça me ferait m’endormir de bonne humeur.

    • laura
      22 avril 2016

      On va rebaptiser le site « les contes des 1001 aventures ». ou les « gondines des 1001 nuits ». haha!

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